ruhlin'ions d's « TE UPS SOU VEA UX » 20
CHARLES ALBERT
PRIX : 10 Centimes
Aux Bureaux des TEMPS NOUVEAUX,
1903
EN VERTE AUX " TEiPS NOUVEAUX "
Dû rêve à l'action, reri, H. L. Drox..........................................................5 »
Précurseurs de l'In te rna tlonal e, W. Tchvrxbbosjt............................l 20
L'Hnmanliphèrd, Duacqum ».....................................................................1 20
L'Art et U Révolution. Vagkkb ................................................................1 20
Bibliographie anarchiste, par Nktilau...................franco 1 85
SouvtnlM d'tui révolutionnaire, par Lhfkasçus................................1 95
Guerre « Militarisme, édition illustrée....................................8 »
Intimités et révoltes» ▼ers, la Jahlitus......................................................1 50
Le* Résolutions, vers, Pbatbllv....................................................................1 50
La Révolte, 7 année*...................... La collection complète 150 »
Les Tempa Nouveaux, 10 Années .........................60 »
Volumes de ohez Stock :
La Conquête du pain, par Ebopotkikk......................................................2 75
L'Anarohie, eon idéal, par Xropotkisk................................1 »
Autour d une vie, par Kropotkjnk............................................3 *
La Sooiété future par J. Ghavs ................................................................2 75
ZA Grande Famille, roman militaire, par J, Gbavb................................2 75
Lindivida et la 8o0lété, par J. Gaavs.........................* a 75
L'Anarohle, son but, ses moyens, par J. Oiuvi................................2 75
Malfaiteurs, par J Gravi..................................................................................2 75
Ld* Aventures de Nono, par J. Gràtc, arec illustrations....................2 75
Responaabilltée# 4 actes, par J. Grayb........................................................2 »
Maie quelqu'un troubla la fête, par màrsollkau................................1 »
Evolution et Révolution, par ELiafcx Rsolus .........................................2 75
La'Commune, par Lopxsx MiCHBr,..................................................................2 75
L'Instituteur, roman, par Ttt. Cukzt............................. 2 75
Le 8ocialisme en danger, D. Kiruwehhci*. ...........................................a 75
L'Amour libre, par Ch. alrkht....................................................................2 75
En marohe vers la sooiété nouvelle, par C. CORxxLMBerw..............2 75
Ceux de Po<Uipn»ïa, par Rbtchvïxowr........................................................2 75
I^es Jugements du Président Btagnaud, annoté! par Lbyr*t..........2 75
La Colonne» par Dssoavm..................................................................................2 75
La Poigne, pièce, par J. Jttllies......................................................................2 »
L'Éoolière. — —, ..................................................................2 »
L'Inévitable Révolution, tin proscrit..........................................................2 75
De chez Bellals :
La Guerre et l'Homme, par P. Lacombs....................................................2 75
Hi9toire de l'Inquisition au moyen âge, par Léa ; 3 Tolumca, chaque 3 s
De chez Pion :
La Vie privée d'autrefois : L'Hygiène, par Frankuit. ........." 3 d
Deux vl«*s, par P. et v, Makqubsutra........................................................3 »
De chez Flammarion :
Paroles d'un révolté, par Khopotkjkb..........................................................1 25
De chez Dcntu :
Le Primitif d'Australie, par El:k R&ct.ua................................................3 »
La Commune, par Li&agaray........................................................................3 »
De chez Dnjarrio ;
Les deux familles, par A. Pourot................................................................3 a
De chez Collln :
Le Conflit, p*r Le Dantec....................................... -. 3 »
Les Porteurs de torches. par B. Lazard:..................................................3 s
Paysans et ouvriers depuis sept cents ans, par G. d'Ave s s r, . 4 >»
De chez Schlelcher :
La Vie ouvrière en France, par PâLLouxiEa............................................5 .s
Les Enigmes de l'Univers, par Hàbcksl..................................................2 »
Les Religions, par A. Lkpkvkk......................................................................6 »
Force et matière, p*r Bctchskk......................................................................7 ï»
L'homme selon la science, par Bfchnhr...........................................7 p
L'Histoire de la Création des Etres organisés, par Hakcjcïc, 12 50
Soienoe et Matérialisme, par Lrtouunkau..............................................5 »
La Psychologie ethnique, par LrrotmNXAU............................................6
Les Guerres et la Paix, par Ricrcitr................................1 50
Les Primitifs, par Elis Rkclus. ....................................................................4 »
L'Origine dos espèces, par Darwin..........................................................8 »
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Publications des « TEMPS NOUVEAUX » - X' .20
Deuxième Tjrage : 20,000 Exemplaires.
P1UX : «O CENTIMES
Au Bureau des « TEMPS NOUVEAUX ♦
1905
«
LETTRE A UN PROLÉTAIRE
I
No sois pas étonné, mon bon Jacques, que j'aie tant tardé de répondre à ta dernière lettre. Le patriotisme, la guerre, l'armée, voilà beaucoup de questions pour une seule fois et de grosses questions.
Tu as bien fait, tout de même, do me les poser ensemble. Car mi ne peut pas toucher à l'une sans toucher aux autres. C'est parle patriotisme que l'on justifie la guerre, en effet, et. par la guerre que l'on justifie la caserne.
Si nous voulons nous y retrouver, commençons donc par le commencement.
Patrie, patriotisme.
Pas de mots qui aient été mis, plus que ceux-là, à tontes les sauces et torturés pour leur faire dire ce qu'ils ne disent pas. Pas de mots qui aient servi à plus d'équivoques etde mensonges. Si nousne voulons plus être les dupes de tous ceux — et ils sont nombreux — qui ont intérêt à perpétuer ces équivoques et ces mensonges, il faut donc, avant tout, déterminer avec soin le sens véritable de ces mots.
Qu'est-ce que le patriotisme?
Tout le monde répond: C'est l'amour de la patrie.
Qu'est-ce que la patrie?
Tout le monde répond encore: C'est le pays où nous sommes nés, où nous vivons, où nous travaillons, où nous participons la vie commune.
Jucque lti, pas de difficulté.
Pourquoi n'aimerions-nous pas notre pays ?Nc nous sentons-nous pas attachés par mille liens au coin «le terre où nous sommes nés, où nous avons vécu, travaillé, souftert, et joui, où nous avons nos parents et nos amis? Comment ne pas avoir le culte des hommes de génie et de talent qui ont illustré notre race? Comment ne pas être fiers de la part qui revient à notre pays dans l'ensemble du progrès humain?
Mais dire que Ton aime son pays ne signifie pas grand'chose. L'amour esl un sentiment tout platonique qui n'engage à rien. Aussi la grosse question est-elle de savoir non pas si le sentimentest légitime, bon ou mauvais, mais comment il doit se manifester; — non pas s'il faut aimer son pays, —tout le monde dans ce sens est patriote — mais comment il faut l'aimer. Ou mieux, comme disent nos professeurs de patriotisme, comment il faut le servir.
Pour le savoir, demandons-nous d'abord ce que c'est que notre pays. La France est notre pays. Très bien. Mais qu'est-ce que la France?
Est-ce un mot en téle d'un papier officiel? Est-ce un chiffon bleu, blanc, rouge ? Est-ce un gouvernement. une administration, c'est-à-dire quelques inutiles prenant une mine grave pour exploiter le travail des autres? Est-ce une succession de rois, d'empereurs et de généraux ? Est-ce une étendue de territoire, telles rivières et telles montagnes, telles plaines ou telles villes ?
Pas plus pour nous, Français, que pour un Anglais ou un Allemand, rien de tout cela ne constitue notre pays. Il n'y a rien tant qu'il n'y a pas des hommes groupés en vue de produire et de consommer ce qui est nécessaire à la vie. Notre pays ne peut être qu'une oeuvre de vie commune et solidaire. Et, par suite, le patriotisme vrai, le seul utile et actif consiste à s'employer de son mieux, chacun selon ses moyens, à entretenir la vie commune, à améliorer les conditions de l'existence au sein de choque nation.
Les seuls qui aient Je droit de dire qu'ils aiment leur pays, parce qu'ils le prouvent, ce sont ceux qui
tri vaillent, ceux qui produisent. Ce sont aussi ceux qui veulent pour leur pays — ou mieux pour ceux qui 1 habitent — le plus de bien-être, le plus de jus-îice, la plus haute culture intellectuelle et morale. Le paysan qui laboure, l'ouvrier qui fabrique, l'inventeur qui trouve des procédés nouveaux de culture ou de fabrication, le savant qui, par ses découvertes, prépare celles de l'inventeur, l'artiste qui crée delà beauté, c'est-à-dire de la joie pour tous, le révolut ionnaire qui par son énergie entraîne Ja foule timide à la conquête de plus de justice sociale, les voilà les vrais, les seuls patriotes. Tous ceux-là payent chaque jour leur dette à leur pays. Ils ne lui doivent donc plus rien et personne n'a rien à leur demander.
Mais nos bons gouvernants, eux, ne l'entendent pas du tout ainsi.
Le patriotisme officiel, celui qu'on enseigne à l'école, estime religion et, comme toute religion, c'est à la fois un mensonge et un moyen d'asservissement.
Quand les bourgeois, nos maîtres actuels, s'emparèrent du pouvoir, il y a plus <1 un siècle, ils savaient très bien que la religion, c'est à-dire le fanatisme, est un excellent moyen de gouverner les hommes. Aussi s'empressèrent-ils de remplacer 1(5 fanatisme Dieu qu'ils avaient eux-mêmes à peu prés ruiné par le fanatisme Patrie. Quand nous sommes encore tout petits, on nous incu1 que avec beaucoup de soin l'amour de la patrie. Maison a bien soin que ce mot ne corresponde à rien de précis, qu il soit pour nous quelque chose d'indéterminéet de vague. C'est l'idole tenible et mystérieuse à laquelle on nous ordonne de tout sacrifier, sans que nous puissions comprendre pourquoi.
A grand renfort de tirades enflammées, on nous rend esclaves d'un mot, d'un mot vide de sens. On pourra ensuite faire dire à ce mot tout ce que l'on voudra, abriter derrière lui tout ce qu'on aura besoin d'y abriter. On n'aura plus qu'à le prononcer pour nou< conduire à toutes les aventures, pour nous faire absoudre tous les crimes.
Et c'est bien ce qui est arrivé.
Au moyen du mot patrie on nous berne et on nous gruge, on nous asservit et on nous abrutit, on nous malmène et on nous affame, de père en fils, depuis plus d'un siècle. Il n'y a pas d'infamie ou de cruauté, d'affaire véreuse, de programme menteur, d'institution oppressive qui n'ait ou n'ait eu ce mot pour devise.
C'est pour la patrie qu'on nous enferme, pendant trois ans, dans une véritable prison, la caserne, quand on ne nous fait pas crever d'insolation sur un champ de manœuvre ou mitrailler sur un champ de bataille. C'est pour la patrie qu'on nous écrase d'impôts et c'est pour la patrie que tous les aigrefins avides de notre argent prétendent nous l'extorquer. Pour la patrie qu'on nous courbe des douze et quatorze heures durant sur un labeur de botes en échange d'un salaire de famine. N'est-ce pas soi-disant pour que les produits nationaux triomphent sur le marché international que les ouvriers nationaux doivent crever de faim en travaillant? Ce qui n'empêche pas d'ailleurs nos patrons patriotes d'embaucher des étrangers, quand ceux-là se vendent un peu meilleur marché que nous, ni d'employer de préférence les matières et produits de l'étranger dès qu'ils y trouvent leur compte.
Si des riches veulent nous prouver que nous devons éternellement rester pauvres, si des forts veulent nous démontrer qu'il faut nous résigner à demeurer faibles, c'est toujours l'intérêt de la patrie qu'ils invoquent. N'est-ce pas le mot en vedette sur les affiches où des candidats nous promettent les mêmes réformes que leurs pères promettaient déjà à nos pères, leurs grands-pères à nos grands-pères? N'esl-ce pas le mot qui ronfle dans tous les boniments ou l'on a la politesse de nous expliquer comme quoi, nous autres prolétaires, sommes les éternels vaincus, les éternels sacrifiés.
ICt jusqu'ici, hélas! ce mot eut toujours raison. Raison de notre bon sens, raison de notre honnêteté. 11 triompha et triomphe comme par enchantement de
— <► —
nos répugnances et de nos scrupules. Quelqu'un vient-il à nous au nom de la liberté, de la justice, au nom de nos intérêts immédiats et de nos besoins les plus pressants, nous gardons contre lui un fonds de méfiance. Mais nous suivons sans explication, au bout du monde, le premier aventurier venu, s'il sait se servir du mot magique.
Tout dernièrement encore une bande de coquins audacieux n'a-t-elle pas essayé de nous prouver avec ce mot qu'il était honnête de maintenir un innocent au bagne, courageux de se mettre vingt contre un passant et héroïque de fabriquer des faux?
Tant que cette religion imbécile de la Patrie continuerai nous en imposer, c'est-à-dire tant que nous n'aurons pas vu clair dans le jeu de ses prêtres, nous serons encore des esclaves.
Voilà assez de mensonges, d'absurdités et de quiproquos. 11 est temps d'en finir avec cette comédie sinistre.
Aux gens qui viennent nous dire à tout propos : la patrie exige, le pays réclame, il est temps de fermer la bouche une fois pour toutes.
La patrie c'est nous-mêmes, ou bien ce n'est rien du tout.
Or, personne ne peut savoir mieux que nous-mêmes ce qu'il nous faut.
U
Chose infinimentcurieuse,iln'ya pas de crime qu'on ne nous oblige à commettre contre notre patrie, au nom du patriotisme.
Sans parler de la guerre, de la tuerie sanglante qui couche par terre des milliers de producteurs, sans parler de la bataille à coups de canon, ce qu'on appelle la paix armée, c'est-à-dire la bataille à coups de milliards, n'estdle pas pour chaque pays une cause toujours agissante de destruction et de misères !
Combien de richesses engloutissent chaque année les budgets de la guerre ! A quoi servent ces fusils, ces baïonnettes, ces canons, ces vaisseaux, ces engins de meurtre périodiquement démodés et mis aft rebut? Que produisent les soldats en échange de leur nourriture et de leur vêtement? Par combien de millions se chiffrent en un mot les dépenses de toutes sortes du militarisme?
Le calcul est facile à faire.
En 1899. le budget s'élevait, en France, ùl milliard 416 millions 705.673 francs, avec un contingent de 627.450 hommes et 122.373 chevaux.
Si lu évalues seulement à 3 francs la journée d'un homme et à 2 francs celle d'un cheval, tu trouves, en travail perdu, une somme de 2 millions 127.099 fr. Multiplie maintenantcechirt're par 300, nombre moyen des journées de travail dans une année et tu obtiens 638 millions 129.700 francs.
Soit pour les dépenses totales de la guerre, pendant une année, 1 milliard 75-i 373 fr.
Essaye de te rendre compte maintenant de ce que représente en progrès industriel et social, en éduca-cation, en instruction et en hygiène, c'est-à-dire en bonheur et en bien-être, une pareille somme.
Mais il y a un calcul qu'on ne fera jamais, parce qu'il s'agit de choses qui nés'évaluent pas en chiffres. C'est celui des richesses intellectuelles et morales que l'armée gaspille chaque jour en même temps que notre argent.
Astiquer tous les jours le môme morceau de cuir, le même bouton ou la même plaque de fusil, répéter cinquante fois de suite, et sans savoir pourquoi, le même mouvement, apprendre à saluer et à marcher, comme si on ne le savait pas déjà, à tourner età virer, à lever le bras ou la jambe, se rappeler qu'il faut boutonner sa tunique à droite ou à gauche, plier une cravate et boucler un ceinturon d'une certaine façon et amais d'une autre, voilà à quoi se passe la vie du soMat. Or un no l'ait pus pendant trois ans de suite ce jiu'IuT de chien savant et d'iiubécile, sans en garder
la marque.
lit ce no serait rien encore si la caserne ne faisait pas de chacun de nous une machine à obéir, comme elle en fait une machine à astiquer et à marcher au pas. Mais au m ni! de la caserne chaque conscrit laisse son cerveau cl sa volonté, toute dignité et toute initiative An régiment, tout cela est remplacé par un seul mot : obéir. Obéir aux ordres les plus idiots, les plus contradictoires, les plus immoraux, les plus grossiers. Obéir sans un murmure, sans un regard, sans un geste, sous la menace d'un code qui punit de mort la moindre velléité d'indépendance. Obéir et avoir peur, car même en obéissant on n'est pas toujours sûr de se tirer d'afl'aire. Selon un dicton de caserne, il n'y a pas de soldat qui ne puisse être pris en défaut.'
La lâcheté morale, l'habitude de se soumettre et de trembler, voilà donc ce qu'on rapporte des casernes.
On en rapporte encore le culte de la force brutale, la religion de la violence. Les militaires professionnels, les of liciers auxquels on nous livre, corps et Aine, pendant trois ans — et cela à un Age où, presque encore enfants, nous subissons si aisément toutes les influences —les officiers forment dans la nation une caste A part, une véritable caste de brutes. Le meilleur officier, le militaire accompli, c'est celui qui >e montre en toutes circonstances la plus parfaite brute. Que peuvent être, en efl'et, l'intelligence et le caractère d'hommes qui, foute leur vie, tiennent,au lieu d'un outil pour produire, une arme pour tuer, d'hommes qui ont abdiqué une fois pour toutes devant le bon plaisir du plus galonné? Comment de tels êtres n'opposeraient-ils pas en toutes choses la violence A la raison? Kn face de l'intelligence et de l'énergie paisible qui peinent. A édifier l'avenir, les poHr sabre représentent donc la bêtise et la violence des Ages lointains. L'armée est, parmi nous, comme un sanctuaire où, pour entraver Tcouvre civilisatrice, pour faire obstacle au progrès, la force bestiale est entretenue «avec soin, idéalisée et panachée, dorée et galonnée. Et, de la caserne, de telles habitudes gagnent par contagion tout le corps social. Les années de service sont, pour chaque citoyen, un apprentissage de brutalité et de bassesse.
Ce n'est pas tout.
Soustrait à l'influence bienfaisante du travail utile, arraché brusquement à son milieu, à 1 affection de ses parents et de ses amis, isolé tout à coup dans les conditions de vie les plus déprimantes, n'ayant à sa portée aucune distraction honnête, soumis à un régime contre nature qui tient de la prison et du couvent, avec à peine quelques heures libres de loin en loin, le soldat se laisse vite aller aux plus sales habitudes de débauche, comme en témoignent assez les bouges rassemblés, dans chaque ville, autour des casernes. Combien reviennent du régiment pourris de maladies honteuses, perdus de paresse et d'ivrognerie?
Et c'est pour cela que, chaque année, un médecin choisit minutieusement les hommes les plus forts, les plus sains, les plus robustes de la nation, ceux que l'on appelle l'espoir delà patrie 1
Ah! les grands patriotes que nos gouvernants. Comme ils aiment leur pays, ces gens qui, sous prétexte de le défendre, —alors que personne ne l'attaque — le livrent chaque jour à des ennemis cent fois plus dangereux que l'étranger, le soumettent à des conditions plus dures que ne pourraient le faire les plus impitoyables conquérants! Et ecsonl ces assassinsde leur patrie, ceux qui chaque année l'appauvrissent, et la corrompent un peu plus, qui viennent nous morigéner au nom du patriotisme !
Avoue que peu de choses sont aussi risibles.
De la guerre et de sa préparation, du militarisme et des armements, de tout ce que nos politiciens appellent la « défense nationale »,une nation ne peut donc attendre que ruines et que misère. Et cela devrait' suffire pour que tous les hommes de cu-ur, dans le monde entier, se révoltent contre l'état de paix armée.
Mais il y a, dans chaque nation, une classe qui supporte plus" lourdement que tout le monde les conséquences du patriotisme de caserne et de revanche. Cette classe, c'est la nôtre, celle des travailleurs, celle des prolétaires.
En attendant de servir à la guerre étrangère, le soldat, en effet, sert encore et sert surtout à la guerre sociale. Gouvernants et possédants, tu le sais, ne reculent jamais devant l'emploi de la force quand ils craignent pour leur pouvoir ou pour leur argent. Notre histoire, comme celle de tous les pays d'ailleurs, est toute sanglante des preuves de cette vérité. Dès que les enfants du peuple réclament un peu plus de liberté et un peu plus de bien-être, c'est à coups de fusil qu'on leur répond. Sans parler des grandeshéca-tombes — comme celles de 1S;I0, 1848 et 1871 — où les prolétaires roulent par milliers sous les balles des défenseurs de l'ordre, il ne se passe pas d'année sans qu'il y ait, ici ou là, quelque massacre d'ouvriers.
Chaque fois que des travailleurs tentent d'obtenir, parla grève, quelques maigres avantages, une petite amélioration à leur sort, c'est à la troupe qu'ils ont affaire. A chaque pas, le gréviste se heurte au soldat.
Veut-il organiser la commune résistance aux prétentions patronales, ce sont des soldats qui l'en empé-chent#en montant la garde autour des usines, autour des chantiers. Tandis que les patrons, de leur côté,
sont libres de concerter, à chaque heure du jour ou de la nuit, telle mesure qu'il leur plaît.
Ce sont encoro des soldats qui, pour intimider les travailleurs, sillonnent les rues de galopades et de charges, quand, chassés du travail parla rapacité patronale, les travailleurs pensent avec raison que leur place est dans la rue.
Et ce n'est passeulement avec ses fusils que l'armée vient en aide au capital, lui assurant ainsi la victoire contre le travail. Chaque fois qu'une grève menace de détraquer certains services publics, tels que chemins de fer, tramways, navigation, postes, etc... ou encore d'entraver la production d'objets de première nécessité, comme le pain, c'est-à-dire chaque fois que les travailleurs ont quelque chance de vaincre dans leur combat pour la vie, ce sont des soldats qui viennent prendre, à la besogne, la place des ouvriers en grève. Le soldat commandé en service de grève n'est pas seulement le policier chargé d'assurer l'ordre*tde protéger la liberté du travail — selon les formules hypocrites par lesquelles, hélasI tant de naïfs se laissent encore abuser, — c'est l'ouvrier devenu, par l'uniforme, esclave de l'Etat et mis par l'Etat au service du capitaliste dans l'embarras. Il joue en face du gréviste le même rôle que l'ouvrier traître à la cause ouvrière, qui, au milieu d'une grève, vient d'ailleurs tirer d'affaire le patron et rendre inutile, par conséquent, la résistance de ses camarades.
Tel est le rôle le plus important de l'armée dans les sociétés modernes : une police pour contraindre et massacrer au besoin les travailleurs, une réserve de bras pour les affamer.
Pour nous autres prolétaires, l'armée n'est donc pas seulement, comme elle l'est pour tout le monde, une institution dégradante et coûteuse. Elle est notre ennemie directe, puisqu'elle est la force brutale mise au service de nos maîtres contre nous. C'est une combinaison par laquelle nos exploiteurs réussissent à faire défendre leurs moyens et privilèges d'exploitation parles exploités eux mêmes.
Dis-moi maintenant si c'est au travail esclave, au travail exploité, au travail crevant de faim à crier : Vive l'armée? Ne sommes-nous pas stupides quand nous poussons ce cri et nos maîtres ont-ils tort de se gêner quand nous leur donnons le spectacle d'une pareille bêtise?
Ne l'oublie pas, Jacques, nous sommes avant tout des prolétaires, c'est-à-dire ceux qui portent aujourd'hui tout le poids, toute la tristesse de la société. Et l'armée, c'est avant tout le sdutiert de cette société.
Beaucoup de régiments, beaucoup de cantfbs et de baïonnettes émettre en ligne contre nous le jour où nous osons réclamer notre part de richesses sociales, voilà où aboutissent finalement les grandes tirades sur la Patrie, les phrases ronflantes sut- le Drdpeatl. Quand nous venons faire étalage d'un chauvinisme imbécile, nous ne faisons donc que justifier, que consolider entre les mains des exploiteurs et des gouvernants celte force invincible contre nous les exploités, nous les gouvernés.
Que des bourgeois s'épanouissent à voir défiler des militaires, drapeau et musique en téte, qu'ils s'attendrissent sur leur bonne tenue et leur air martial, rien de plus juste, puisque ces braves garçons vont monter la garde à la porte des banques, des usines, des chantiers, des ministères. C'est la sécurité des colïres-forts, l'éternité des privilèges qui passent. Comment ceux qui ont les coffres-forts et détiennent les privilèges ne se découvriraient-ils pas?
Mais nous autres, nous qu'on mitraille danfc les rues pour un oui ou pour un hdn I Pour nous, le bataillon qui passe ne peut être que la servitude. La servitude et la honte, car dès qu'il endosse la livrée du soldat, l'homme du peuple trahit, malgré lui, les siens. Le prolétaire-soldat, c'est l'homme du peuple dressé à la défense des riches et des puissants, équipé et armé contre ses frères.
Un jour — tu te rappelles peut-être avoir lti ça dans les journaux — l'empereur Guillaume, passant
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des troupes eu revue, leur parla ainsi : « Avec les menées socialistes actuelles, il pourrait arriver que je vous ordonne de tirer sur vos propres parents, sur vos frères, môme sur vos pères et vos inères, et alors vous devriez obéir à mes ordres sans hésiter. »
L'empereur d'Allemagne n'a fait que répéter la ce qui se trouve inscrit sur le livret de chaque soldat dans chaque pays, ce qui sera inscrit sur ton livret le jour où l'on t'en remettra un. Le premier sergent venu peut nous coininandcrle même crime.Kt si ceux contre lesquels on nous ordonne de décharger nos armes sans hésiter ne sont pas toujours nos frères par le sang, ne l'oublie pas, Jacques, ce sont nos frères tout de même, nos frères de misère, nos frères de travail, nos frères de classe.
IV
De temps à autre nos maîtres nous disent : Prenez patience; attendez que nous soyons débarrassés nous-mêmes de la guerre, nous vous délivrerons ensuite de la caserne. Et nos maîtres, en effet, ont l'air de vouloir la paix. Ils échangent entre eux des messages de paix. Ils ne prononcent pas un discours sans y faire l'apologie de la paix. Rien n'est plus touchant.
Mais où est le pays qui retranche un centime à son budget de guerre, un soldat de ses régiments, un canon de son artillerie, un vaisseau de sa Hotte?
Sais-tu ce qui se passait en Russie du mois de septembre 1898 à latin du mois de janvier 1899, c'est-à-dire au moment même où le tsar lançait son fameux message pour la paix et convoquait, à la Haye la fameuse conférence de la paix? Non? Eh bien, voici :
Le 20 septembre 1898, ordre d!augmenter et de fortifier la flotte de la mer Caspienne. — Le 45 no-
vembre, décision de faire construire deux nouveaux cuirassés. — Le H décembre, ordre de construire dix contre-torpilleurs. —Le 20 décembre, 90 millions de roubles sont affectés à la construction de nouveaux vaisseaux de guerre et de nouveaux ports. — Le 12 janvier 1899, remise d'un budget augmenté de 34 millions de roubles pour l'armée et de 16 millions pour la marine. — Enfin, le 19 janvier, décision de construire trois cuirassés, trois croiseurs et trois torpilleurs.
Pour des gens qui ne pensent qu'à la paix, voilà d'assez beaux préparatifs de guerre.
Et partout il en est de même. Partout les dépenses de guerre augmentent de plusieurs millions chaque année et les contingents se renforcent de plusieurs milliers d'hommes.
Il y a dix ans, l'Europe gaspillait en armements de toutes sortes 5 milliards 175 millions. Elle gaspille aujourd'hui 7 milliards 185 millions. J1 y a dix ans, elle entretenait sur le pied de guerre 3 millions huit cent mille hommes. Elle en entretient aujourd'hui 4 millions deux cent mille.
Et pas un gouvernement qui ne soit prêt à déchaîner la guerre sous le plus futile prétexte. Pas un gouvernement qui ne soit prêt à inventer ce prétexte au besoin et à mentir de la façon la plus odieuse, pour obtenir du peuple les moyens de faire la guerre.
Témoin, sans chercher plus loin, cette expédition de Chine où les soldats européens sont en train de massacrer de pauvres diables quasi sans défense. D'après les dépèches officielles, tout était là-bas à feu et à sang. Il n'y avait plus de sécurité pour personne et les Européens fixés dans le pays étaient déjà aux trois quarts anéantis. Les Chinois — qui, soit dit en passant, ont horreur de la guerre — étaient devenus tout à coup des militaires hors ligne et notamment — racontaient les journaux — des tireurs de première force.
Tout cela n'était qu'un roman forgé de toutes pièces, roman démenti dès qu'il arriva de Chine dos
nouvelles non officielles. Un seul Européen, en effet, l'ambassadeur allemand, avait payé de sa vie le sale niétier qu'il faisait là-bas. Quant aux terribles Chinois, une poignée d'hommes suffit toujours pour en mettre des milliers en déroute. Ces redoutables tireurs visent en élevant leur arme à deux mains au-dessus de leur tété. Voilà un détail qui se retrouve dans presque toutes les lettres reçues depuis le commencement de la campagne et qui en dit long.
Tu vois de quels mensonges sont capables, pour déchaîner la guerre, les amis de la paix. Et il s'agirait d'un vaste conflit, d'une grande guerre européenne, les choses ne se passeraient pas autrement.
Le seul moyen de la rendre impossible, cette guerre européenne dont tout le monde parle, dont tout le monde a peur, sans que personne fasse rien pour l'éviter, serait qu'Une grande nation mît spontanément bas les armes. Mais voilà justement ce dont aucun gouvernement ne veut. Tous, pour se justifier, font semblant de croire que le peuple qui désarmerait le premier serait immédiatement la proie de ses voisins. Voilà des gens qui ont sans cesse aux lèvres le mot de paix, qui n'ouvrent jamais la bouche sans affirmer qUe tous leurs efforts tendent à maintenir la paix et qui ne s'avouent pas moins incapables de voir une nation désarmée sans fondre immédiatement sur elle! Faut-il tout de même qu'on nous croie stupides pour oser nous servir de pareilles inepties!
Chaque nation veut la paix, c'est entendu. Mais avant de faire un pas vers la paix, chaque nation attend que sa voisiné commence. De ce train-là, nous pourrions attendre longtemps. Si nous sommes assez naïfs, du moins, pour attendre, à notre tour que nos maîtres commencent.
Car ils ne commenceront pas. Les gouvernements ne proclameront pas la paix. Et la raison en est simple. Pendant que les peuples nieurent de la guerre, de la guerre à coups d'armements comme de la guerre à coups de canons, les gouvernants, eux, en vivent. Ils en vivent de bien des façons.
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C'est par la guerre que les banquiers et trafiquants de toutes sot tes, grands industriels et hauts barons de finance, s'enrichissent. Ne leur faut-il pas sans cesse de nouveaux débouchés pour leurs produits et des terres vierges pour leurs spéculations, c'est-à-dire de nouvelles colonies? lit par conséquent de nouvelles guerres, tantôt pour conquérir ces colonies, tantôt pour faire respecter, comme actuellement en Chine, la vie et. les biens des bandits qui les exploitent. Et il suf.rait d'un désaccord entre deux nations avant un pied dans le même pays d'outre-mer pour amenerune guerre européenne.
N'est-ce pas encore en fabriquant pour les soldats de leur pays des conserves avariées et pour l'étranger d'excellents canons et d'excellents vaisseaux que nos grands patriotes se font des rentes? Or ces gens-là, inaitres de l'or, sont partout les maîtres du pouvoir, les maîtres des trônes, des ministères, des parlements. Ils restent dans la coulisse, mais ce sont eux qui décident de nos destinées et règlent les boucheries où nous trouverons la mort. Ce sont eux qui tiennent les ficelles de la comédie où nous sommes, nous autres, oujours dupés et toujours rossés.
C'est aussi par la guerre que se maintient vivacc le sentiment nationaliste. Et il importe aux gouvernants que ce sentiment ne s'affaiblisse pas. Il n'y a >as, en effet, de pouvoir fort sans antagonisme entre es nations. Aussi, pour que les peuples restent bien gmupés autour des brigands qui les exploitent et bien dociles, on les rue parfois J'un contre l'autre ou tout au moins on attise par l'idée de la guerre leurs rancunes et leurs haines.
Que feraient, d'ailleurs, nos maîtres le jour où ils ne pourraient plus cacher leurs exactions et leurs abus de pouvoir derrière les prétendus intérêts de la drftmse nationale? Que feraient-ils le jour où, sommés de répondre sur leurs méfaits, ils ne pourraient plus dire, aux tribunes des parlements ou ailleurs, que Vhonneur du drapeau riait t'nyagé ?
Mais la guerre étrangère sert surtout à justifier l'armée et le rôle qu'elle joue dans les conflits de classes. Les nécessités delà défense nationale servent à couvrir les besoins de la défense capitaliste et les nobles exploits du champ d'honneur à masquer les honteuses besognes de grèves et d'émeutes. Car on a beau être cynique, on ne peut pas avouer que l'armée est une vaste gendarmerie pour maintenir le pauvre sous le joug du riche et le travailleur sous le joug de l'oisif.
Il y a aussi une question de prestige. Panaches, ferrailles et galons, fanfares et drapeaux en imposent aux foules naïves. Qu'elle miroite au soleil ou^s'en-fonce dans la peau des affamés, Pépée toujours sert le pouvoir. Les souverains d'ordinaire s'habillent en généraux et leur grande occupation est de passer des troupes en revue. Osent-ils se montrer vêtus comme tout le monde, leurs plus petits déplacements s'effectuent parmi des branle-bas de guerre.
Et voilà ceux qui nous promettent de désarmer ! Allons donc! Quand nos maîtres renonceront à l'impôt du sang, ils y seront contraints. La paix entre les hommes ne sera l'œuvre ni de rescrits princiers, ni de congrès de diplomates. Elle sera l'œuvre des peuples. Et pour que les peuples en viennent à bout, il faudra qu'ils commencent par se révolter contre leurs maîtres. Les gouvernants, eux, continueront d'être des agents de discorde et de conflit, entre lesnations, parce qu'ils ont tout à gagner à ces discordes et à ces conflits. Ils feront la guerre, ou plutôt ils nousfcla feront faire pour leur compte aussi longtemps que nous leur fournirons des armées dociles.
Voilà pourquoi il est absurde de dire, comme on le fait si souvent, qu'on ne peut pas se passer d'armées, de canons et de fusils tant qu'il y a des risques de guerre. S'il ne faut pas toucher à l'armée tant qu'une guerre est possible, comme justement la guerre sera possible et même probable tant qu'il y aura des armées, nous ne verrons jamais la fin des guerres,
la fin des armées.
C'est bien là ce qu« voudraient nos maîtres et voilà pourquoi ils nous entretiennent avec soin dans ce raisonnement d'idiot. Chaque nation—ou plutôt chaque gouvernement — justifie l'armée par la nécessité de se défendre. Ce qui n'empêche aucun gouvernement de se servir de cette armée de défense pour l'attaque.
Kt il v a des gens qui se laissent enfermer dans ce misérable cercle vicieux. 11 y a de pauvres naïfs qui protestent à la fois de leur haine pour la guerre et de leur respect pour l'armée. Mais qu'est-co donc que l'armée, sinon la guerre qui se prépare? On veut arracher aux maîtres du monde le droit de faire à leur guise le meurtre et la désolation et on leur en laisse le moyen! On ne veut plus de massacre et l'on garde la caste dangereuse qui l'étudié et le perfectionne !
Tant qu'on sera bête à ce point, sois-en sûr, on verra les empereurs, les ministres et les financiers — pro-fitants nés de la guerre— assembler par dérision des congrès de la paix !
11 ne faut jamais oublier qu'en définitive la guerre et l'armée se soutiennent et se confondent. Il est donc impossible de combattre utilement l'une des deux sans les combattre toutes deux.
A bas l'armée, à bas la guerre. Voilà le double cri de ceux qui veulent en finir avec cette double barbarie.
A bas l'armée, parce que l'armée, par elle-même, l'armée, même quand elle reste dans ses casernes, est une chose ignoble, une chose à détruire.
Mais à bas l'armée aussi, parce que l'armée sert à faire la guerre.
Ht de même :
A bas la guerre, parce que la guerre, par elle-même, la guerre, même si elle est faite avec des volontaires, est une chose ignoble, une chose à détruire.
Mais à bas la guerre aussi, parce que la guerre sert à justifier l'armée.
Les préjugés ont la vie dure. On a beau dire, on a beau prouver que la guerre et le militarisme sont deux fléaux qui s'engendrent l'un par l'autre et doivent être combattus l'un en même temps que l'autre, on trouve toujours de braves nigaud? qui vous parlent d'épurer et de réorganiser l'armée, au lieu de la détruire.
C'est là que s'en tiennent encore des tas de gens, qui se croient très avancés, de sincères socialistes, do sincères antimilitaristes. Nous aussi, disent-ils, nous détestons la caserne, nous détestons la guerre. Mais nous voulons tout de même pouvoir nous défendre, si on nous attaque. Or, si nous voulons nous défendre, il faut bien organiser notre défense.
Sous une apparence de bon sens, rien n'est plus bête. Quand on dit : « Nous voulons nous défendre», de qui parle-t-on? Qui ça, nous? Nous les travailleurs, nous les prolétaires? Et contre qui nous défendre? Contre des prolétaires comme nous, contre les travailleurs d'Allemagne, d'Italie ou d'Angleterre? Mais on ne se défendque contre ses ennemis. Or, ces gens-là ne sont pas nos ennemis. N'ont-ils pas les mêmes intérêts que nous, les mêmes besoins, les mêmes souffrances, les mêmes joies? Ne sommes-nous pas cent fois plus près d'un menuisier ou d'un tisserand de Berlin que d'un banquier ou d'un commerçant de Paris? .
Non, Jacques, quand des soldats étrangers marchent contre nous, ce ne sont pas nos ennemis. Nos ennemis sont les gouvernants, les capitalistes qui ont mis ces soldats en branle. Ce sont encore les gouvernants, les capitalistes qui nous mettent nous-mêmes en branle. Ce sont encore les officiers qui nous conduisent à la bataille pour le compte des gros bonnets de la politique et de la finance. Et si nous avions pour deux liards de bon sens et de courage, c'est contre
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ceux-là que nous partirions en guerre. Quand nous parlons, nous autres, d'organiser la défense nationale, nous ne faisons que nous solidariser d'avance avec nos ennemis contre nos amis.
Il n'y a pas, comme la plupart le croient, deux sortes de guerres, les unes légitimes où l'on se défend, les autres injustes où l'on attaque. Toutes les guerres se ressemblent et ce sont toujours des attentats concertés entre deux gouvernements contre deux peuples.
On prétend ne marcher que pour la défense. Mais il faudrait d'abord savoir, quand éclate une guerre, qui est-ce qui se défend et qui est-ce qui attaque. Or, voilà justement ce qui est impossible.
Ça te parait peut-être drôle? Tu vas voir pourtant que rien n'est plus exact. Nous passons pour nous être défendus, en 70, contre les Allemands. On l'enseigne à l'école, on le répète un peu partout. Mais ne peut-on pas dire tout aussi exactement que les Allemands se défendaient contre nous? La dernière et terrible grande guerre fut voulue, en effet, avec autant d'acharnement par le gouvernement de France que par celui d'Allemagne, parce qu'une guerre à ce moment favorisait leur politique à tous les deux. Aussi le premier prétexte fut-il le bon. Ce fut, tu le sais, la candidature d'un parent du roi de Prusse au trône d'Espagne. Mais c'aurait pu être tout aussi bien n'importe quelle autre histoire. La vraie cause de la guerre fut que les deux gouvernements avaient besoin, ou croyaient avoir besoin, en même temps, d'une guerre. Afin de rendre la rupture irréparable entre les deux pays, Bismarck alla jusqu'à falsifier une dépêche, la fameuse dépêche d'Ems. Le bandit prussien eût donc été fort ennuyé si les choses s'étaient arrangées. Mais le bandit français, de son côté, et surtout son entourage, n'avaient-ils pas fait d'abord tout leur possible pour envenimer un incident qu'un mot de conciliation pouvait apaiser?
Que vient-on nous parler, après ça, d'attaque ou de défense? Qu'est-ce quecelasignifie?Quand les choses se passent comme elles se passèrent en 70 — or elles se passent toujours à peu près de même — quels sont ceux qui attaquent, quels sont ceux qui se défendent? Voilà ce que devraient bien nous dire les pauvres imbéciles qui croient encore à la défense nationale.
Depuis qu'on se massacre auTransvaal, on lit dans tous les journaux que les Boërs sont les combattants héroïques du droit, les défenseurs glorieux de leur liberté et de leur pays. Rien de plus inepte encore. Et parmi ceux qui répandent ces bourdes, beaucoup le savent fort bien. Mais ils savent aussi qu'avec de pa reils mensonges on nous entretient dans la religion des boucheries. Or, ils sont plus ou moins pa>és pour ça.
En réalité, les soldats de Kriiger ne sont pas plus sympathiques que ceux de Chamberlain, parce que Krttger n'était pas plus obligé d'accepter la guerre que Chamberlain de la provoquer. Si les Boërs sont écrasés aujourd'hui et souffrent mille maux, ils l'ont bien voulu. Comme tous ceux qui permettent à leurs gouvernants d'appeler sans raison le pillage et la ruine sur leur pays, ce sont non pas des hommes courageux, mais des criminels et des lâches. Leur excuse, — comme ce fut la nôtre en 1870 — c'est qu'ils ne savent pas ce qu'ils font.
Les prétentions des Anglais — causes de la guerre — ne compromettaient en rien la richesse du pays dans son ensemble, ni le bien-être, ni la liberté des habitants. Le devoir des gouvernants boërs était donc de faire toutes les concessions voulues pour éviter la guerre, et le devoir du peuple boër d'exiger que ces concessions fussent faites. Sans doute, il y avait dans cette guerre, comme dans toute guerre, des intérêts en jeu, mais des intérêts de trafiquants et d'agioteurs, des intérêts ignobles, des intérêts dont les peuples ne sont pas solidaires et dont aucun homme honnête ne peut être "solidaire. On vit fort bien cela, dès qu'il fut question defaire sauter les mines d'or. Les hommes du peuple, les naïfs, ceux qui se battent parce qu'on a su leur persuader qu'ils défendent leur liberté ou leur bien être, ceux-là trouvent ce moyen de résistance toutnaturel. Ce sont les gouvernants, les riches qui s'y opposent. Naturellement, puisqu'ils espèrent après la guerre tirer un plus gros profit des mines, et qu'ils n'ont pas fait la guerre pour autre chose.Mais en attendant et pendant que ces mines, propriété sacro-sainte des gros actionnaires anglais et boërs, sont religieusement respectées, on trouve très bien que chaque jour les biens des petits fermiers boërs soient exposés aux brigandages des troupes anglaises.
Et l'on viendra nous dire que le peuple boër est un peuple libre et fier qui se défend ! Allons donc 1 c'est un peuple d'esclaves qui défend l'or de ses maîtres. C'est en refusant de se défendre contre les Anglais que les Boërs se seraient réellement défendus. Leur défense actuelle est un suicide. Or, de même qu'un homme a tort de se suicider par misère et doit, plutôt, voler ce dont il a besoin, un peuple a tort de se suicider pour le bon plaisir de ceux qui l'exploitent et le gouvernent.
Que tu prennes la guerre franco-allemande ou la guerre actuelle des Boërs avec les Anglais—deux guerres bien différentes, cependant — il ne s'agit donc jamais, tu le vois, d'une nation réellement attaquée par une autre nation et contrainte par elle à se défendre, mais, comme je te le disais tout à l'heure, d'un attentat concerté entre deux gouvernements, attentat volontaire de chaque côté, agression mutuelle et réciproque. Cette fameuse formule la défense nationale, cette formule dont nos maîtres savent si bien jouer, et à laquelle tant de badauds se laissent prendre, contient donc, en somme, deux mensonges énormes, un dans chaque mot.
Premièrement, il n'y a pas de défense nationale, parce que ce n'est pas défendre une nation que de défendre les intérêts de quelques-uns dans une nation.
Secondement, il n'y a pas défense du tout, parce que la première condition pour avoir le droit de dire qu'on se défend, c'est d'être attaqué. Or il n'y a pas aujourd'hui de nation réellement contrainte de résister, les armes à la main, à une véritable agression.
Il n'y a pas de guerre qui ne puisse être évitée par une concession sans importance pour la prospérité réelle d'un pays.
Pourtant, si la guerre éclate ? me diras-tu.
Mais cela dépend de nous, justement. Elle n'éclatera pas si nous savons nous y prendre. Ce sont les dirigeants qui nous représentent la guerre comme une fatalité contre quoi personne ne peut rien. Et nous de répéter, dociles : « C'est la guerre, on n'y peut rien », et de nous laisser conduire aux abattoirs comme des bêtes résignées. Pourtant la guerre ne se fait pas toute seule. Chaque fois que le mauvais coup se prépare, c'est que quelques-uns le veulent et que le plus grand nombre laisse faire. Il n'y aura plus de guerre quand nous ne voudrons plus qu'il y en ait. Et le meilleur moyen d'en finir, c'est précisément de travailler tout de suite et sans aucun scrupule à la suppression de l'armée.
Et si la guerre éclate malgré nos efforts et si, faute d'organisation, nous sommes battus? Voilà une objection que tu entendras souvent.
Eh bien !si noussomincs battus, tantpisou tantmicux comme tu voudras, car cela n'a pas la inoindre impor-. tance. Sans doute on joue de la défaite comme d'un spectre terrible pour nous effrayer. Mais la défaite nationale commelarfc/Vnse nationale est un motvide de sens. 11 suffit de réfléchir un peu pour le comprendre.
La défaite peut-elle ajouter quelque chose aux misères et à la honte de la guerre? Que nous a coûté notre défaite de 70? Quelques milliards et un peu de territoire. Est-ce que ces pertes, nos pertes, comme disent les revanchards, ont beaucoup modifié la prospérité générale du pays? Non, évidemment. Essaye de calculer au contraire ce que nous a coûté, en richesses de toutes sortes, la guerre elle-même.
Ce n'est pas la défaite qu'il faut redouter, c'est la guerre. Ce n'est pas de la défaite qu'il faut rougir, c'est de la guerre. Et il vaut mieux risquer la défaite pour empêcher la guerre, que de s'exposer à la guerre pour empêcher la défaite.
Me voici au bout de ce que j'avais à te dire.
Je t'ai montré le néant et le mensonge du patriotisme officiel.
Je t'ai montré comment la paix armée, qui n'est qu'une forme de la guerre, nous opprime et nous atfame, comment la caserne nous déforme moralement et physiquement, nous abrutit et nous corrompt.
Je t'ai montré que le militarisme n'était pas seulement une institution dégradante et coûteuse pour un pays dans son ensemble, mais qu'en armant les prolétaires contre eux-mêmes il équivalait pour le peuple à un véritable suicide.
Je t'ai montré que les intérêts en jeu dans les conflits internationaux ne sont jamais les nôtres, A nous travailleurs.
Je t'ai montré enfin que la croyance à la fatalité de la guerre, et à la nécessité de la défense nationale, ainsi que la peur de la défaite, sont de simples et d'absurdes préjugés entretenus par nos maîtres à l'aide des plus grossiers sophismes.
11 reste maintenant à conclure, et la conclusion, tu la devines. Il faut en finir avec cet esclavage qui fait de l'homme du peuple l'assassin de ses frères et l'instrument docile des ambitions, des appétits et des vengeances deses maîtres. Il faut en finir avec la comédie sinistre qui, sous le nom de patriotisme, se joue sur notre dos depuis tant d'années. Il faut en finir avec la guerre, celte partie d'échecs que jouent les puissants avec les humbles comme pions et comme enjeu. Il faut en finir avec la caserne où, pour la sécurité des riches, on abrutit les enfants des pauvres. Il n'y a plus, aujourd'hui, la moindre hésitation possible, plus le moindre doute, le moindre scrupule à conserver. Nous serions les derniers des imbéciles et lesderniers deslâchessi nous ne voulions pas de toutes nos forces nous libérer de cette odieuse loi de sang au moyen de laquelle on nous a plies» vaincus, écra-sésjusqu'ici.
'Reste à savoir comment nous pourrons y réussir.
Certains nous conseillent d'attendre, nous parlent de lois et de réformes qui ne peuvent pas manquer d'arriver un jour ou l'autre, à condition que nous soyons bien sages. Si nous comptons là-dessus, nous pouvons attendre longtemps. Je t'ai expliqué, en effet, que les maîtres du monde, les riches, les puissants, ceux qui font et défont les lois, ceux qui d'un trait de plume pourraient mettre fin aux crimes, aux misères, aux hontes de la guerre et de la caserne, je t'ai expliqué que ceux-là ne le feront jamais de leur plein gré, car ils sont, eux-mêmes, les auteurs de ces crimes, de ces hontes, de ces misères, ils en profitent, ils en vivent.
• Pour nous affranchir de la servitude militaire, nous ne devons donc compter que sur nous-mêmes, et nous n'avons pour cela qu'un moyen : Refuser de nous y
soumettre.
Tant que nous nous laisserons conduire aux boucheries comme des moutons dociles, il y aura des boucheries et des bouchers pour se faire de l'argent ou de la gloire avec notre peau. Tant que nous accepterons d'habiter des casernes, de porter la livrée et les armes du soldat, il y aura des régiments et des casernes.
Voilà ce qu'il faut bien comprendre, Jacques, voilà le point sur lequel il ne faut nous laisser donner le change par aucune théorie, par aucune promesse, par aucune grimace. Nous n'en aurons fini, bien fini avec l'odieux servage où nous tient le militarisme que le jour où nous serons décidés à la révolte, prêts pour le refus d'obéir, le jour où, au lieu de quitter nos parents, nos amis, notre travail pour aller accomplir dans une ignoble caserne notre temps de bagne militaire, nous resterons tranquillement chez nous.
Tu vas me d're qu'on ne se révolte pas facilement coutre l'armée moderne, c'est-à-dire contre la plus terrible organisation de la force brutale qui se soit jamais vue. Sans doute, il n'y a pas deux institutions défendues comme celle-là par un code de violence et de mort, un code qui punit des peines les plus barbares le moindre mot, le moindre geste. Et l'on voit bien, rien qu'aux précautions prises pour la conserver intacte, que l'armée est la base indispensable de la société bourgeoise. Mais qu'importe la férocité des Codes, je le le demande, si on n'ose pas lesappliquer? < >r on n'osera pas, on ne pourra pas appliquer les lois aux réfractaires, quand ceux là seront assez nombreux, assez résolus, assez unis pour en imposer aux gouvernants.
Sur ce point comme sur les autres, c'est l'union,' c'est l'entente qui seule peut nous rendre forts et seule nous sauver.
En Russie, en Autriche, en Hollande, des cas de refus du service se sont déjà produits, tu lésais peut-être. Des hommes de toutes les conditions sociales et parmi eux quelques prolétaires se sont déjà insurgés contre l'odieuse servitude. I!s n'ont pas voulu revêtir la casaque du soldat. Et quand on a mis des armes dans leurs mains, ils les ont laissées tomber par terre.
ïl y a quelques années, un Hollandais du nom de Van der Veer répondait à l'appel qui le convoquait à la caserne par une lettre qui fit quelque bruit et oùil signifiait à ses chefs que sa conscience lui défendait d'apprendre à tuer ses frères étrangers, comme elle lui défendait de soutenir l'ordre social établi.
Mais pour oser, de la sorte, se dresser tout seul en face du monstre militariste et le braver, pour oser tenir tète à cette terrible puissance, sans regarder derrière soi si l'on est suivi et soutenu, il faut un courage qui ne se rencontre pas souvent . Aussi de tels actes restent-ils forcément très rares. Et encore les gouvernants cherchent, il va sans dire, et parviennent quelquefois à les tenir secrets, surtout lorsque leurs auteurs sont d'obscurs prolétaires.
Devant ceux qui les accomplissent, nous ne nous découvrirons jamais assez bas. Ce sont de véritables héros, des héros qu'on honorera, un jour, comme on honore aujourd'hui ceux qui les premiers osèrent s'insurger contre la tyrannie des prêtres. Mais précisément parce qu'il faut pour de telles actions un courage surhumain, beaucoup présument . trop de leurs forces et succombent après une plus ou moins longue résistance.
Voici ce qui se passa il y a trois ans à peu près, en Hollande, sans que la presse des autres pays en souffle mot, il va sans dire. Cinq conscrits de différentes villes avaient refusé de tirer au sort et se promettaient de persister dans leur refus de servir. Trois d'entre eux faiblirent en arrivant au corps. Mais les deux autres tinrent bon et furent emprisonnés. L'un des deux céda à son tour aux exhortations des chefs et de sa famille. Mais le dernier résista. Il vient seulement de se rendre après avoir passé plus de deux ans en prison. Et le malheureux était à moitié fou, quand il-a demandé grâce.
Mais ce que ces martyrs et ces héros de l'antimili-tarisme ont osé faire isolément, individuellement, si nous le faisions, nous autres, collectivement en nous unissant, en nous groupant, en nous soutenant les uns les autres, crois-tu que ce ne serait pas bien plus facile et bien plus efficace?
Suppose que la centième partie seulement des hommes appelés, chaque année, au régiment, refusent un beau jour de rejoindre leur corps. Que pourrait-on, que ferait-on contre eux?
Absolument rien. D'abord parce que, devant un acte de cette importance, les gouvernants seraient affolés et ne sauraient quel parti prendre. (On l'a vu assez par leur attitude en face des quelques refus individuels qui se sont produits jusqu'ici.) Ensuite parce que l'exemple de ces quelques centainesde milliers de réfractaires en entraînerait immédiatement des mil-
liers d'autres. Tu sais bien que les malheureux conscrits qui partent chaque année pour leur sort ne demandent, malgré leurs stupides fanfaronnades, qu'à rester chez eux. Pour décider ces timides, il ne faudrait qu'un nombre un peu imposant de courageux.
C'est donc au refus collectif de servir, autrement dit à la grève des soldais, que nous devons songer, nous autres prolétaires. C'est pour atteindre ce résultat qu'il faut nous organiser.
Et cette tâche n'est pas au-dessus de nos forces. Nous sommes bien parvenus à nous grouper, d'une façon imparfaite encore, mais déjà puissante cependant, pour la défense de nos intérêts économiques. Si bien qu'aujourd'hui quelques jours suffisent pour que d'un bout à l'autre du pays, des travailleurs par milliers, et des travailleurs de tous métiers, soient debout prêts à la lutte contre les patrons. Pourquoi'ne réussirions-nous pas à nous grouper, à nous organiser d'une façon tout aussi puissante, pour nous défendre contre cette autre exploitation de nous-mêmes qui s'appelle leser-vice militaire? D'autant plus que cette exploitation se confond en somme avec l'autre, puisque, comme je te l'ai expliqué plus haut en détail, elle tourne finalement au profit de nos employeurs.
Oui, Jacques, il nous faut absolument organiser la grève militaire comme nous organisons déjà la grève économique, car la première n'est que le complément indispensable de la seconde. Et n'avons-nous pas, justement, pour nous faciliter cette besogne, nos syndicats professionnels, nos unions de métiers qui peuvent devenir autant de moyens de résistance au militarisme, autant de foyers d'agitation contre les crimes de la caserne et les crimes de la guerre ? Si chacun de ceux qui font partie de ces groupements devenait conscient de son devoir en face du militarisme, crois-tu que nous ne serions pas bientôt les plus forts et les maîtres d'agir à notre guise?
C'est à ce résultat qu il faut viser. Mais pour aboutir à ce résultat une propagande incessante est nécessaire, tu le comprends bien. Fît c'est là une tâche qui
regarde les plus intelligents, les plus dévoués, les plus conscients, en un mot l'élite des travailleurs 1 Or, j'espère que si tu as bien compris tout ce que je t'ai dit dans ma lettre, tu voudras être, dès aujourd'hui, dans ton coin, l'un des bons ouvriers de celte tâche.'
moocftfcc TMMllMlRtC <*, *** ACtL-NOwSlA^O^E, V-
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Les Tempi nouveaux, Xuopotkinr» aveo oouv. de C. Pissarro. ... 30
Pages d'histoire socialiste, pvr W. TcHBRKKsor*..................................» 30
La Panaoèe-Révolution, par J. Grave, areo couverture do Habbl. . » 16
L'Ordre par l'anarchie, par D. Saujun...............................................» GO
Les Syndicats et la Révolution,-par L. Nim............................................» 16
L'Art et la 8ociêt6c par Oh. àlbbrt......................................n 20
A moù frère le paysan, par E. Rbclos» oout. de L* Ohevaxiek............» 10
La Morale anarchiste» par K&oroTXiNB, couv. de Btssblbbbohb— » 15
Déclarations, D'J&rrëvANT, couverture de Jbhaknxt....................................n i&
Rapporta au Congrès antiparlementaire, cour, de 0. Disay..........» 85
La uolonisation, par J; Grave, oouverture de Ootjtubibr......................» 16
Marchand-Fashoda par L. Go*takt.........................................* 15
Entre paysans, par B. Malatbsta, courertore de Willauhk................» 15
Le Militarisme, par D. Nibcwbnhuib, couverture de Ooms** Ache. .. » 15
Patrie, Guerre et Caserne, par Or. àt.bbht, couv. d'Agar..................x» 15
L'Organisation de la vindicte appelée justioe, par Kropotkinb,
couverture de J. HA^ault..............................................a 15
L'Anarchie et l'Eglise» par B. Bbclits et Guïoc, couverture de
Daumont»...................................................................>• 15
La Grève des Electeurs» par Mirbbatj, couv. de Boubkllb..................m 16
Organisation, Initiative» Cohésion, J. Grave» couv. de 8io*ac... t> il Le Tréteau électoral, piécette eu vers, par Léonard, couverture de
TlBionruNCK..................................................................n 16
L'Eleotion du Maire, ld.f par L4o*ard, couv. de Vallotuk........ » 15
La-Mano Negra, couverture do Luck.....»........................, » 15
La Responsabilité et la Solidarité dans la lutte ouvrière,
par Nettlau» ooo v. de Dklannot*, .................................d 15
Anarohie-Commantsme, Kropotkine, couv. de Lochard....................* 16
L'Anarchie, par B. Malatesta..........................................................................n 20
L'Anarchie, par A. Girard................................................................................» 10
Aux anarchistes qui s'ignorent, par On. Albert, couverture de
Si j'avais à parler aux électeurs, J. Grave, couv. de Hkidbrisck. j> 15
La Mano Negra et l'Opinion française» couverture de HàxAUi/r.. » 10
La Mano Negra, dessins de Hrrkank-Paul................................................» 40
Images à l'usage dee enfanta. — Chauvinaud : 3 fr. le cent.
Documents Socialistes, Dal............................................» 40
Au Calé, Malatbsta..............................................................................................» 30
Chansonnier révolutionnaire........................................» 40
Le Rôle de la Femme, Fxsorkr......................................................................» 35
Justioe, Fischer...............................................................» 35
La Guerre, Htrbe.au..............................................................................................» 35
Entretien d'un philosophe aveo la Marèohale, par Diderot,
oouverture de Graswooax.......... ........................................................>» 16
ffti Procès en Russie, par Tol&toï..........................................................» 35
L'Immoralité du Mariage, par B. Ohauoui............................................0 16
à paraître
La lutte contre la Tuberculose, par Pierrot.
(\) Prises dans nos Bureaux, les petites brochures se vendent 0 tr. 05 oo 0 fr. 10 en moins selon l'affranchissement.
Millième Imprimerie, 7* me Abel-Hovelacque, Parte.